Après le renversement du régime de Ben Ali en 2011, la Tunisie a mis en place un système politique visant à éviter une trop forte concentration du pouvoir. Toutefois, ce nouveau système n'est pas satisfaisant : il a abouti à une telle dispersion du pouvoir que l'action publique en devient inefficace et minée par le clientélisme. De profondes réformes doivent être conduites pour rendre les gouvernements plus efficaces et légitimes. Sinon, la tentation autoritaire pourrait faire son retour.
"Cet ouvrage permet de découvrir l'histoire des militants d'extrême gauche et islamistes tunisiens et leur combat politiqué de jeunesse notamment sur les campus universitaires. Il offre des clés de lecture historiques et sociologiques essentielles pour décrypter trajectoires et stratégies de cette génération, dont une bonne partie a accédé à des positions de premier plan depuis le départ de Ben Ali en 2011.À partir de l'analyse des données biographiques de 250 activistes "gauchistes" et "islamistes", l'auteur montre quels sont les ressorts et les motivations de l'engagement politique dans un régime où le risque encouru s'avère en général plus important qu'en régime dit "démocratique". L'apport majeur de ce travail demeure la notion d' "origines socio-identitaires" (élite médinale, médinale, publicienne et extra-muros) qui permet de comprendre les logiques d'intérêts sous-tendant les conflits politiques au-delà des oppositions habituelles entre "classes sociales" ou "courants idéologiques" et de penser la diversité des destinées individuelles, notamment professionnelles, de manière plus complexe qu'uniquement à travers la notion d' "origine sociale". Ainsi, cet ouvrage montre en quoi les tensions sociales et politiques, qui jalonnent l'histoire de la Tunisie et qui sont toujours d'actualité en 2017, sont le reflet d'une lutte entre élites séparées par l'origine sociale et géographique, la maîtrise du bilinguisme des membres de leur parentèle et les traumatismes politiques et familiaux transmis durant l'enfance. Au-delà de sa contribution à la sociologie du militantisme et des élites, l'auteur met en évidence la fracture socio-identitaire qui trace les limites de la citoyenneté dans la Tunisie d'aujourd'hui et donne surtout des clés pour défier la persistance des mécanismes de répartition du pouvoir dans une Tunisie où l'exigence d'inclusion et de justice demeurent des ressorts puissants de contestation et de violence."--Page 4 of cover
Résumé Les discours qui réduisent les révolutions tunisienne et égyptienne à des « révolutions Facebook » demeurent à bien des égards mus par les fantasmes technophiles et néo-libéraux de la « démocratie 2.0 1 ». Il ne s'agit pas d'amoindrir le rôle des « nouveaux médias sociaux » dans ces soulèvements ni de faire l'impasse sur la manière dont ils ont permis de diffuser l'information, d'organiser des rassemblements et de créer des réactions émotionnelles encourageant la prise de risque. Il convient plutôt de s'interroger sur les soubassements de ces éléments de langage, mieux, sur le dispositif dont ils sont l'expression.
International audience ; Le groupe professionnel des avocats tunisiens ne constitue pas un bloc homogène. Il est soumis, comme sous d'autres latitudes, à des contradictions et aux aléas des dynamiques historiques qui traversent l'État et la société. L'histoire récente du corps des avocats est symptomatique des tentatives répétées, et également des difficultés, du pouvoir présidentiel à contrôler une profession libérale dont l'action, si l'on reprend le discours de ses représentants, se doit de contribuer à garantir le respect de l'État de droit, les droits de la défense et le droit pour les justiciables à avoir procès équitable. Cette profession est à ce titre perçu par les gouvernants comme potentiellement dangereuse et éminemment politique pour l'ordre autoritaire. Par conséquent, il est hors de question pour les pouvoirs publics de garantir à ses instances dirigeantes le contrôle restrictif de l'accès à la profession et de permettre aux avocats d'accumuler trop de ressources économiques et politiques. Seuls ceux qui ont fait allégeance au pouvoir présidentiel ont vocation à s'enrichir. En échange, ces avocats œuvrent à la mise sous tutelle de la profession. Pour eux l'adhésion au régime de Ben Ali suppose un renoncement aux valeurs supposées intangibles de l'avocature. Ils sont amenés à utiliser leurs ressources juridiques et leur savoir-faire professionnel pour se positionner comme soutien de l'ordre établi, même si celui-ci viole les valeurs humanistes et individualistes endossées par le Barreau.
International audience ; Le groupe professionnel des avocats tunisiens ne constitue pas un bloc homogène. Il est soumis, comme sous d'autres latitudes, à des contradictions et aux aléas des dynamiques historiques qui traversent l'État et la société. L'histoire récente du corps des avocats est symptomatique des tentatives répétées, et également des difficultés, du pouvoir présidentiel à contrôler une profession libérale dont l'action, si l'on reprend le discours de ses représentants, se doit de contribuer à garantir le respect de l'État de droit, les droits de la défense et le droit pour les justiciables à avoir procès équitable. Cette profession est à ce titre perçu par les gouvernants comme potentiellement dangereuse et éminemment politique pour l'ordre autoritaire. Par conséquent, il est hors de question pour les pouvoirs publics de garantir à ses instances dirigeantes le contrôle restrictif de l'accès à la profession et de permettre aux avocats d'accumuler trop de ressources économiques et politiques. Seuls ceux qui ont fait allégeance au pouvoir présidentiel ont vocation à s'enrichir. En échange, ces avocats œuvrent à la mise sous tutelle de la profession. Pour eux l'adhésion au régime de Ben Ali suppose un renoncement aux valeurs supposées intangibles de l'avocature. Ils sont amenés à utiliser leurs ressources juridiques et leur savoir-faire professionnel pour se positionner comme soutien de l'ordre établi, même si celui-ci viole les valeurs humanistes et individualistes endossées par le Barreau.
International audience ; Au sortir de l'indépendance, les cadres supérieurs tunisiens, très peu nombreux, ont constitué un acteur central de la "modernisation" et du "développement". Intervenant dans la définition et la conception des politiques publiques, ils sont proches de la puissance publique et des nombreuses ressources que celle-ci est prête à lui accorder. Aujourd'hui, les cadres de la fonction publique ne se situent plus dans la ligne nodale des besoins de légitimation de la technostructure du régime institué par le président Ben Ali. Ils héritent d'une politique de gel des salaires déguisée et d'une fonction publique qui ne représente plus le sommet de la réussite sociale.
International audience ; Au sortir de l'indépendance, les cadres supérieurs tunisiens, très peu nombreux, ont constitué un acteur central de la "modernisation" et du "développement". Intervenant dans la définition et la conception des politiques publiques, ils sont proches de la puissance publique et des nombreuses ressources que celle-ci est prête à lui accorder. Aujourd'hui, les cadres de la fonction publique ne se situent plus dans la ligne nodale des besoins de légitimation de la technostructure du régime institué par le président Ben Ali. Ils héritent d'une politique de gel des salaires déguisée et d'une fonction publique qui ne représente plus le sommet de la réussite sociale.